4/4/2021
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Une juste rémunération pour nos producteurs, ça veut dire quoi ?

Thibaud CHAUSSET
Directeur Offre & Filières

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Chez Omie & Cie, la juste rémunération est au cœur de notre modèle. Mais qu'entend-on précisément par juste rémunération et comment la calcule-t-on ?
Pour illustrer cet engagement fondamental pour nous et pour le monde de demain, nous avons choisi de vous parler du cas du lait, car c’est justement un produit pour lequel la rémunération des éleveurs a été trop souvent malmenée.

Qui produit le lait que nous vous proposons ?

Nous travaillons avec En Direct Des Éleveurs (EDDE), une initiative lancée en 2015 par Fabrice Hégron, éleveur laitier qui a repris avec son frère le groupement d'exploitants de son père et qui regroupe aujourd’hui 30 éleveurs.


Avant de reprendre l’exploitation familiale, Fabrice a travaillé de nombreuses années dans le secteur de l’alimentation animale. Il a alors pris conscience de l’impact de l’élevage, et plus particulièrement de l’impact de l’alimentation animale sur l’environnement, la santé des animaux et la qualité des produits alimentaires.

Lorsqu’il décide de reprendre en 2006 l’exploitation familiale, il s’engage pour des modes de production respectueux du bien être animal et de l’environnement.

Fabrice Hégron du collectif « En Direct Des Éleveurs »

La crise du lait de 2009, révélateur d’un malaise profond

Trois ans après, Fabrice connaît la crise du lait de 2009 : c’est l’année où les éleveurs manifestent dans la rue en jetant leur lait par terre pour protester contre le prix du lait incroyablement bas qui ne leur permet plus de vivre. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : un éleveur gagne moins de 500€, un éleveur se suicide tous les 2 jours…

Alors même que la course à la taille des exploitations est engagée : on est passé de 120 000 exploitations laitières en 1999 à moins de 55 000 en 2020. 

Or, on entend alors dans les médias toutes sortes de notions aux allures rassurantes comme “prix rémunérateur” ou de rémunération “supérieure de XX% au prix du marché”. La difficulté, lorsqu'on calcule uniquement à partir du cours du marché, c’est qu’on reste décorrélé de la notion de revenu. Sans oublier que trop souvent cette rémunération ne s’applique que sur une partie seulement du volume de production de l’éleveur. Et le reste de la production est mal, et souvent très mal, payé.

Ce qui compte, c’est bien le salaire net qu’un agriculteur peut dégager à la fin du mois, bien plus que le prix de la matière première. Et c’est là que le bât blesse…

Éleveurs du collectif « En Direct Des Éleveurs »

Avec « En Direct Des Éleveurs », un salaire net de 1700 euros / mois est garanti

Au sein du collectif En Direct Des Éleveurs, un éleveur atteint au minimum un salaire net de 1700€ / mois (certifié par un cabinet indépendant qui analyse les comptabilités annuelles de chaque éleveur), soit 3 à 4 fois plus que la moyenne du milieu.

En effet, selon les sources, le salaire mensuel net d’un éleveur dépourvu des charges d’exploitation, varie en France entre 500€ et 700€.

Génial ! Mais comment arrive-t-on à ce résultat ?

Beaucoup trop souvent aujourd’hui, les prix des matières agricoles sont basés sur une économie de marché, c’est-à-dire la loi de l’offre et la demande, ce qui implique un prix d’achat tellement bas que les agriculteurs travaillent à perte. On ne prend pas du tout en compte ce que l’agriculteur investit et dépense pour produire ce que nous lui achetons.

C'est ce qu'on appelle le coût de revient, qui évalue combien coûte à un agriculteur la production de tel produit. Ce coût de revient dépend de chaque exploitation, de son profil, de ses spécificités.

Garantir un prix sur 100% des volumes sans limite de temps

Quand on connaît les coûts de revient de l’agriculteur,  on peut justement fixer un prix d’achat approuvé par les deux parties : l’acheteur et le vendeur. Il est important que le prix soit fixé sur une période donnée longue car la volatilité des prix du marché est très compliquée pour un éleveur. 


Graphique fourni par EDDE

Chez EDDE, tout appartient aux éleveurs : les fermes et la laiterie.

C’est donc en collaboration qu’ils fixent le prix d'achat du lait permettant viabilité économique de l’exploitation agricole, rentabilité de la laiterie et prix juste pour les consommateurs : soit le juste coût des choses.

Un litre de lait au départ de la laiterie est fixé à 0,72€ pour 100% des volumes produits par les éleveurs. C’est ce 100% qui change tout et qui se différencie de la plupart des initiatives qui se disent justes en termes de rémunération.
Car beaucoup trop d’initiatives qui annoncent un prix d’achat du lait supérieur à la moyenne le pratiquent sur une partie seulement du volume d’un éleveur. Ce prix n’est pas représentatif du salaire qu’il obtient au final.

Éleveurs du collectif « En Direct Des Éleveurs »

Pour faire un parallèle, c'est comme si un employeur communiquait uniquement sur le taux des heures supplémentaires pour parler du salaire de ses employés…

C’est pareil ici : quand 20 ou 25% des volumes de production d’un éleveur sont achetés à prix correct, c'est loin d'être suffisant, car les 80% restants, eux, sont payés au prix fixé par les cours du marché et donc très souvent trop bas.

S'engager dans des pratiques vertueuses

Lorsque nous fixons le prix d’achat chez Omie, nous le faisons en concertation avec les agriculteurs, en déterminant avec eux leurs coûts de revient.

Ce qui implique une forte responsabilisation chez les agriculteurs pour maîtriser les coûts de revient. C’est ce que fait En Direct Des Éleveurs avec chaque nouvel éleveur entrant dans le groupement.

En effet, EDDE étant géré par des agriculteurs, ils s’appuient sur les forces de chacun pour tenter de gérer leurs exploitations de la meilleure manière possible. Ces mêmes pratiques qui permettent des économies sont également des pratiques vertueuses pour l’environnement et le bien-être animal. Tout le monde y gagne !

Parmi ces pratiques, on peut noter…

Une alimentation saine pour les vaches, via des aliments issus des cultures de l’exploitation, 0 OGM, 0 huile de palme et un soin tout particulier à leur bien-être. Car des vaches en meilleure santé, c’est moins de maladies et donc moins de traitements.

On remarque ainsi 80% de maladies en moins chez les éleveurs d’EDDE, donc 80% de traitement en moins et 8000 € d’économies par exploitation et par an (sources : CNIEL, certification sur les éléments comptables par un cabinet indépendant, certifications vétérinaires).

Éleveurs du collectif « En Direct des Éleveurs »

Le pâturage dynamique, en faisant tourner les vaches sur les zones de pâtures, ce qui permet de supprimer l’utilisation d’intrants chimiques car elles s’occupent du désherbage !

Au-delà du bénéfice pour l’environnement, cela représente environ 5000€ d’économies annuelles pour l’exploitant.

Ainsi, en prenant exemple sur les meilleures pratiques de chaque éleveur du projet, les économies pour une exploitation de taille moyenne sont estimées à 30 à 40 000 € par an, ce qui permet à chaque éleveur, de concert avec un prix d’achat juste et garanti sur 100% de la production, d’avoir un salaire décent.

Redonner l’outil de production et le pouvoir de décision aux agriculteurs sur la fixation du prix

Il est indispensable que les agriculteurs soient consultés et aient leur mot à dire sur la fixation des prix. Le contraire est impensable ! Et c’est beaucoup trop souvent le cas lorsque les agriculteurs vendent leurs matières premières (lait ou culture) à des grosses coopératives ou à des groupes privés.

Éleveurs du collectif « En Direct Des Éleveurs »

Une autre force du modèle d’En Direct Des Éleveurs, c’est que chaque éleveur, en entrant dans le projet, devient actionnaire de la laiterie montée par Fabrice Hégron.

Ainsi les 30 éleveurs ont non seulement du poids dans la fixation du prix d’achat du lait, mais une fois que la laiterie sera rentable, ils toucheront une partie des bénéfices.

C’est un vrai projet entrepreneurial pour chaque éleveur qui est impliqué dans toutes les décisions. Et cela permet aussi de recréer du lien avec le monde de la consommation (on vous fera aussi un article sur le sujet).

S’engager pour des prix justes, c’est garantir aux producteurs une rémunération juste et stable dans le temps

Chez Omie & Cie, s’engager pour des prix justes, c’est s’engager dans la durée pour que tous les acteurs de la filière, à commencer par les agriculteurs, puissent vivre dignement de leur travail.

Un prix juste est un prix qui reflète le travail réalisé. C’est aussi un prix qui est accessible à tous. Et nous sommes capables de le faire car nous nous concentrons sur l'essentiel et éliminons le superflu : les intermédiaires, les distances parcourues, les emballages, les dépenses marketing.

Et nous garantissons une totale transparence sur nos produits ! A l’heure où un grand groupe laitier vient de gagner, via un recours au Conseil d’Etat, le droit de ne pas dire aux consommateurs d’où vient son lait, nous pensons que cette transparence est la base de la confiance entre un consommateur et une marque.

C’est le pari d’Omie et cela implique un travail en profondeur sur chaque produit pour trouver le meilleur compromis.

Un produit bon, sain et accessible pour le consommateur, une rémunération juste et stable pour producteurs et transformateurs, et des pratiques durables respectueuses de l’environnement et des animaux.

Pensez-y quand vous dégustez vos produits !