Comment l’équipe d’Omie décide-t-elle de développer un produit ? Pour certains produits, le choix est très simple : ils peuvent être produits en France, en qualité et quantité suffisantes, à des prix abordables. Pour d’autres, c’est plus compliqué. 
A l’heure de la crise écologique, on ne prend pas à la légère la décision d’offrir un produit qui vient de loin, ou qui nécessite beaucoup d’eau pour pousser... C’est alors qu’entre en scène la charte des achats sobres, véritable guide de la décision pour une marque à impact comme Omie.
Entre nécessité de diversité alimentaire, poids des habitudes et responsabilité environnementale, voici comment Omie fait ses arbitrages.
Entretien avec Thibaud Chausset, Directeur filières et agriculture chez Omie

Thibaud Chausset, directeur filières et agriculture chez Omie

Thibaud, pourrais-tu nous dire d’où vient la charte des achats sobres et qui l'utilise chez Omie ?
Thibaud : Nous avons créé la charte des achats sobres en 2022, dans un contexte de croissance de notre équipe. Actuellement, ce sont les équipes Filières et Offre qui l'utilisent chez Omie, soit environ 13 personnes. Cette charte nous permet de garantir que le développement de nos produits respecte notre mission et nos valeurs, en maximisant l'impact positif perçu par chacun.
Concrètement, elle nous aide à savoir si on lance un produit ou non. Qu’est-ce qui est absolument nécessaire, qu’est-ce qui répond à un besoin ? Qu’est-ce qui est superflu et trop « coûteux » d’un point de vue environnemental ? La charte permet de trancher en cas de débat. C’est particulièrement important maintenant que nous diversifions notre offre, après avoir développé les grands basiques de l’épicerie au début d’Omie.
Est-ce que cette approche est singulière ou est-ce que d'autres marques alimentaires utilisent également ce type de charte ?
C'est très différenciant. L’objectif premier des marques alimentaires lamba, c'est le potentiel d'achat. Elles sont généralement motivées par le profit, alors que nous sommes également axés sur l'impact. Omie cherche toujours à avoir un impact positif sur l'environnement et la société, notamment grâce à l’agriculture régénérative, contrairement à une entreprise classique qui fait de la RSE en cherchant seulement à diminuer son impact négatif.
C'est d'ailleurs pour cela que notre équipe qui développe les produits est constituée à 50% d'ingénieurs agronomes spécialisés dans les sujets environnementaux.
Quels sont les critères qui justifient un "no-go", autrement dit la décision de ne pas développer un produit selon la charte des achats sobres ?
Tout d'abord, on ne veut pas encourager la consommation de produits venant de l'autre bout du monde lorsqu’on peut soutenir une production locale. Cependant, on est conscients que notre alimentation est basée aussi sur des produits qui viennent de loin, comme le thé ou le café. Lorsqu'il n'y a pas d'alternative locale, on autorise le développement et l’achat de produits non locaux, lorsqu’ils sont acheminés par bateau. Tout avion qui entre dans le flux logistique entraîne inévitablement un no-go.
Ensuite, tous nos produits doivent passer par une validation au niveau des filières. On examine les techniques de culture, la traçabilité et on veille au respect des personnes qui travaillent dans ces filières, autrement dit aux conditions de rémunération équitable pour les fabricants et les agriculteurs. Un manquement à ces critères nous conduit à remettre en question voire à abandonner le développement d’un produit.
Quels sont les enjeux liés aux filières exotiques ?
Les filières exotiques soulèvent des risques spécifiques : déforestation, fraude ou travail des enfants... Idéalement, on aurait besoin de se rendre sur place pour réaliser des diagnostics agronomiques, mais on ne dispose pas des moyens nécessaires pour le faire.
Donc pour ces filières, on applique le principe de précaution. On cherche à minimiser les risques en recherchant des labels bio et équitables, et on pose aussi des questions supplémentaires pour évaluer ces filières.
Comment conciliez-vous les enjeux de prix et de sobriété dans vos achats ?
On ne fait aucune concession ni sur le prix ni sur la traçabilité des produits. On établit un prix qui correspond à la véritable valeur du produit. Par exemple, pour les cacahuètes, on a identifié une filière en France, mais les prix sont excessifs. L’objectif d’Omie est de remplacer des produits par des alternatives vertueuses, sans pour autant les rendre inaccessibles au plus grand nombre. Par ailleurs, le fait de travailler en direct avec les producteurs nous permet aussi d'éviter les marges excessives.
Peux-tu nous donner un exemple de produit que vous avez choisi de ne pas développer en suivant la charte des achats sobres ?
On a choisi de ne pas proposer de riz basmati, car il existe du riz français produit en Camargue. Pour le moment, on ne propose pas non plus de cacahuètes, car on n'a pas encore trouvé une filière apportant les garanties nécessaires sur la gestion de l'eau, un enjeu majeur pour la production de cacahuètes. Cela ne veut pas dire qu’on n'en fera jamais, on continue à chercher.
On a mis beaucoup de temps à développer notre gamme de muesli et de granola, mais on a fini par y arriver, avec de bons ingrédients locaux. Nos granolas contiennent des flocons d'avoine français, du chocolat garanti sans déforestation et des fruits secs traçables grâce à notre collaboration avec nos partenaires. Nous avons également remplacé une partie du sucre par du sirop de betterave produit dans les Hauts-de-France.