24/9/2020
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Grande distribution : pour le meilleur ou pour le pire ?

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En bref ... Depuis quelques années, le modèle économique de la grande distribution semble avoir atteint ses limites : les plus gros hypermarchés sont à la peine et nous recherchons de plus en plus des solutions alternatives (local, circuits courts, distribution bio…). La grande distribution serait ainsi obligée de se réinventer pour s’adapter aux évolutions profondes du monde et aux nouvelles attentes des consommateurs.

Mais peut-elle vraiment se transformer et ainsi, porter l’avenir de l’alimentation ?

Les enjeux de l'alimentation : tour d'horizon

Photo by Brooke Lark on Unsplash

Les enjeux sont multiples et complexes, à commencer par la santé, qui regroupe divers aspects :

  • la sécurité alimentaire à court-terme (alimentation « sûre ») : les produits vendus ont-ils été fabriqués, transportés et stockés dans des conditions qui ne mettent pas en danger le consommateur ?
  • la sécurité alimentaire à long-terme (alimentation « saine ») : les produits vendus sont-ils suffisamment riches en nutriments de qualité ? Quel est l’impact de la transformation de ces aliments sur la santé ? Plus généralement, quel impact ont ces aliments sur l’équilibre nutritionnel et la santé des consommateurs ? Cet enjeu intègre notamment la question des produits chimiques (engrais, pesticides, conservateurs et autres additifs).
  • la quantité : avons-nous assez de produits pour nourrir tout le monde ?

Autre enjeu qui mobilise beaucoup plus les consommateurs que nous sommes aujourd’hui : l’impact environnemental, à travers les modes d’agriculture, les emballages, le gaspillage, le transport.

L’impact sociétal, un sujet que nous n’avions pas vraiment à l’esprit il y a dix ans, est devenu lui aussi plus visible et l’on souhaite aujourd’hui une juste rémunération des agriculteurs, mais aussi de tous les acteurs de chaque filière, ce qui nécessite des engagements à long terme.

Enfin, un argument fort de la grande distribution a longtemps été de rendre accessible une alimentation saine pour tous. Si cet aspect reste important, il est aujourd'hui loin d'être suffisant…

Et nos attentes ont fortement évolué


Etude Cooking Lab, Marmiton, 2017


Aujourd’hui, nous nous préoccupons tous de l’impact de l’alimentation sur notre santé. Sucres cachés, aliments transformés, boissons sucrées…Nous scrutons avec toujours plus d’exigence de nombreuses catégories de produits, grâce, entre autres, aux étiquetages nutritionnels et aux applications de scoring (Yuka, Siga, OpenFoodFacts…).

La structure des familles change aussi avec l’augmentation du nombre de « petits » foyers d’une ou deux personnes (retraités qui vivent plus longtemps, familles monoparentales, célibataires…) et un besoin moindre d’achats « massifs » une fois par semaine.

L’impact du virus et du confinement a également été considérable : on reparle de souveraineté alimentaire, on s’intéresse encore plus aux circuits courts… Cette crise inédite semble accélérer cette mutation.

Quel est le problème aujourd'hui ? 

La grande distribution « à la française » est un cas presque unique en Europe car les modèles de distribution des autres pays sont souvent largement différents. En Italie, notamment, il n’y a pas de distributeurs aussi grands qu’en France et la logique de distribution est avant tout régionale. De ce fait, la question des circuits courts ou de la souveraineté alimentaire se pose moins, car le système existant est, de ce point de vue, déjà assez vertueux.

Photo by Matheus Cenali on Unsplash

En France, en revanche, on découvre depuis quelques années un certain nombre de dérives :

  • la très grosse pression sur les fournisseurs pour faire baisser les prix, ce qui diminue mécaniquement les revenus des producteurs et agriculteurs et accentue la détresse d’un monde agricole qui doit choisir entre une agriculture plus vertueuse mais qui constitue un pari sur le long terme, et une approche plus industrielle qui peut, lorsqu’elle privilégie trop le profit, avoir des impacts négatifs sur l’environnement et la santé du consommateur (et de l’agriculteur) ;
  • autre conséquence du point précédent, on observe parfois une dégradation de la qualité des produits qui permet cette baisse des prix (remplacement d’ingrédients par d’autres moins “nobles” et surtout moins chers, comme le beurre par l’huile végétale, ou encore l'utilisation de subterfuges comme le “foisonnement” qui permet d’intégrer de l’air aux glaces, vendues désormais au litre et non plus au kg) ;
  • un autre point est aujourd’hui montré du doigt : le manque de transparence et de lisibilité des produits, que ce soit du point de vue de leur composition (il y a plus de 50 manières de nommer les sucres pour qu’ils soient moins visibles parmi les ingrédients) ou de leur packaging (diminution du poids d’un paquet, changement de conditionnement, glace vendue au litre et non au poids pour diminuer les coûts de production, maxi-packs pour pousser à acheter de plus grandes quantités…) ;
  • le prix n’est plus forcément lié à la qualité des produits mais à beaucoup d’autres critères (notoriété de la marque, positionnement en linéaire, labels divers et variés…) ;
  • trop de choix en magasin, qui mènent à beaucoup de gaspillage : 41% des dons alimentaires proviennent de la Grande Distribution, ce dont on peut se réjouir… ou pas car un tel volume d’invendus est alarmant ! Ne soyons pas naïfs : ces dons constituent au final de grosses enveloppes de défiscalisation car ils sont considérés comme des dons en nature aux associations ;
  • l’écrasement de la concurrence, notamment des “petits commerces” et la désertification des centres villes au profit des grandes zones industrielles.

Photo by Ethan Feng on Unsplash


Ces phénomènes sont liés au modèle économique de la grande distribution, qui consiste à acheter en quantités toujours plus grandes pour obtenir des prix toujours plus bas. Il faut noter que cette concentration des « centrales d’achat » n’est pas le seul fait de la grande distribution, car ce mouvement de concentration a aussi lieu au sein des gros groupes agroalimentaires qui sont au final une petite dizaine à se partager la quasi-totalité des marques connues dans le monde. D’autant que les accords annuels sont négociés en premiers avec les grands groupes et ensuite avec les plus petits. Quand c’est leur tour, la place est souvent déjà prise. Aujourd’hui, l’enjeu en magasin est de choisir les produits qui rentreront dans les rayons car il y a bien plus de produits que de place dans les supermarchés…


Ce partage du budget des consommateurs entre grosses multinationales paraît aujourd’hui bien loin de nos attentes… Les grandes enseignes de distribution l’ont (enfin) compris et s’activent pour accélérer leur mutation.

Ce qu’a apporté la grande distribution

Pour la grande distribution, la difficulté aujourd’hui est de mieux répondre à nos attentes tout en conservant les ingrédients qui ont fait son succès

Car ce système a bien eu des impacts positifs sur notre quotidien en rendant accessibles à tous des produits qui ne l’étaient pas, soit d’un point de vue géographique, soit en termes de prix. Certains produits sont maintenant disponibles toute l'année. La sécurité alimentaire a aussi beaucoup progressé pour atteindre un très haut niveau.

Mais cette alimentation sûre et accessible a un coût : il a fallu axer ses efforts sur la rentabilité, ce qui signifie acheter moins cher (le marché s’est ainsi concentré en 4 centrales d’achat qui pèsent 90% du marché de la distribution alimentaire française), puis exceller dans l’optimisation pour être à la fois compétitif en terme de prix et de rentabilité. Il a fallu optimiser la logistique en construisant des entrepôts gigantesques, optimiser les frais de personnel en magasin (avec les dérives que l’on connaît), optimiser les surfaces de ventes en proposant toujours plus de produits au mètre carré et plus de promotion…


Comment changer ?

Après plus de cinquante ans à construire et consolider ce modèle, la grande distribution est-elle en capacité de changer pour répondre aux nouvelles attentes ? Cela voudrait dire changer la politique d’achat des produits, en ne se basant plus que sur les coûts, mais en intégrant l’impact santé (long-terme), environnemental et sociétal des produits.

Photo by Ross Findon on Unsplash

De fortes implications pour la grande distribution

Une réelle évolution impliquerait des engagements forts de la grande distribution qui devrait notamment :

  • avoir des critères restrictifs pour les achats et se doter d’une expertise de fond pour juger de leur respect par les marques ;
  • ne plus vendre certains produits qui génèrent beaucoup de chiffre d’affaire mais ne correspondent plus aux critères définis ;
  • faire de la vraie pédagogie auprès des consommateurs (là où aujourd’hui il y a pas mal de « greenwashing »), c’est à dire expliquer ce qui n’est pas parfait dans tel ou tel produit, nous aider à comprendre les compositions et les impacts des produits, donc faire preuve d’une très grande transparence ;
  • contractualiser à long terme les achats et donc faire mécaniquement baisser sa capacité de négociation : pour encourager des pratiques agricoles en protégeant les agriculteurs avec une contractualisation à l’hectare et pas au volume fourni.

Ce faisant, la grande distribution renierait une de ses valeurs fondamentales : l’universalité, ce concept du « tout sous le même toit » ! En faisant des choix différents, il faudrait trancher sur le « niveau de qualité » des produits, donc soit aller vers une plus grande qualité et laisser une partie de ses clients aller vers du discount, soit différencier ses magasins, faire un peu des deux, sans s'engager sur une réelle démarche de changement. Cela irait à l’encontre de son modèle, basé sur une offre large dans de gros magasins avec des achats massifs auprès des mêmes producteurs.

De plus ce choix impacterait fortement la rentabilité du modèle, tout comme le fait de privilégier la qualité et la durabilité des produits. Sans oublier la difficulté de faire bouger un écosystème où les partenaires sont principalement de grosses multinationales avec, elles aussi, des contraintes de rentabilité…

Devenons acteur de ce changement !

Lorsqu'on se demande si la grande distribution peut porter l’avenir de l’alimentation, la réponse est a priori non, à moins de changer radicalement de modèle… et ce changement ne peut se faire que si l’évolution de la demande et des usages est forte et rapide. 

Car avant de dénoncer les abus de la grande distribution, n’oublions pas que nous - consommateurs - avons notre part de responsabilité, puisque nous sommes leurs clients. Si nous faisons massivement des choix différents, elle n’aura pas d’autre option que de changer en profondeur pour ne pas disparaître…

Ce mouvement est déjà amorcé, nous sommes de plus en plus conscients de la nécessité d’inventer de nouveaux modèles :

  • qui font le choix de produits responsables et durables sans céder à la tyrannie du prix bas ;
  • qui ont un ancrage local fort ;
  • qui mettent au cœur de leur démarche la transparence ;
  • qui font preuve de pédagogie pour expliquer et éduquer le consommateur ;
  • qui travaillent avec les producteurs pour développer des pratiques plus durables.
Photo by Mika Baumeister on Unsplash

Certains acteurs sont déjà en train de faire ces choix, comme Biocoop dans la distribution Bio. Quant à la grande distribution, certains s’y mettent (et communiquent dessus), mais sur une partie infime de leur offre, ce qui reste largement insuffisant. Ces mastodontes de la grande distribution se joindront-ils plus massivement au mouvement ou se contenteront-ils d’une évolution du discours ? Les paris sont ouverts…

Pour Omie, les principes sont clairs !

- faire des choix sur ce qu’on considère le meilleur des possibles aujourd’hui, du point de vue environnemental, social et de la santé, tout en restant sur des prix accessibles;
- garder un nombre de produits limités (une seule référence par besoin) pour concentrer notre effort de qualité et celui des producteurs avec qui nous travaillons ;
- pour vous garantir cette transparence, ne vous proposer que des produits à notre marque (tout en mettant en avant les producteurs) ou de marques avec lesquels nous sommes en étroite collaboration et qui partagent nos engagements ;
- jouer la carte de l’information et de la pédagogie pour vous rendre - vous consommateurs - plus à même de faire les bons choix ;
- couvrir tous vos besoins de base ;
- vous simplifier la vie avec une livraison de proximité, respectueuse de l’environnement grâce à notre principe des tournées (et bien plus pratique que d’aller en voiture au supermarché) ;
- s’engager sur la question des emballages (les réduire au minimum, réduire leur impact environnemental) et proposer des solutions pratiques pour vous.